欧博官网Boxe: comment Bivol a fait chuter le roi Canel
Champion unifié des super-moyens et considéré par beaucoup comme le meilleur boxeur toutes catégories confondues, Saul "Canelo" Alvarez s’offrait un défi XXL le week-end dernier à Las Vegas face au Russe Dmitry Bivol, champion WBA des mi-lourds. Un challenge raté par la superstar mexicaine car conclu sur une défaite sur décision unanime. Le RMC Fighter Club débriefe cette performance magistrale qui a secoué le monde du noble art.
Le champion n'était pas le favori des bookmakers. Mais la victime annoncée de nombreux observateurs a déjoué les pronostics. Champion WBA des mi-lourds depuis fin 2017, titre qu’il a désormais défendu huit fois, Dmitry Bivol a conservé sa ceinture ce samedi soir dans la T-Mobile Arena de Las Vegas en infligeant à la superstar mexicaine Saul "Canelo" Alvarez la deuxième défaite de sa carrière après celle contre Floyd Mayweather en 2013.
Une performance magistrale construite derrière un jab hyper efficace, en attaque comme en défense, des combinaisons 1-2 qui ont fait mouche, une capacité à savoir accélérer/freiner quand il le fallait et la faculté d’éteindre l’autre avec ses énormes qualités défensives (son pourcentage des coups adversaires qui le touchent en carrière est de 12,7% contre par exemple un 13,9 % pour Shakur Stevenson, champion unifié des super-plumes vanté pour sa défense).
Le combattant russe n’était pas seulement plus grand que son adversaire ce samedi. Il était aussi plus fort dans sa prestation de boxe globale. En face, Canelo semblait manquer de solution, clairement frustré et incapable de s’adapter alors qu’il est connu pour savoir le faire, et ne présentait pas son habituel niveau défensif, avec des mouvements de pieds et de buste loin de ses meilleurs standards, sans doute gêné par l’allonge de Bivol même si l'argument perd de sa valeur quand on constate que Callum Smith ou Caleb Plant, deux récents adversaires du Mexicain, en possèdent une supérieure.
La volonté de Canelo de frapper le bras du Russe pour annihiler son jab, comme il l’avait réussi face à Callum Smith fin 2020, n’aura pas non plus fonctionné. "Pas d’excuse, le meilleur a gagné", reconnaissait-il juste après le combat… même s’il précisait aussi penser avoir gagné. Et de poursuivre en se passant lui-même (et à raison) la brosse à reluire: "Je suis sorti de ma zone de confort pour combattre à un poids qui n’est pas le mien et il n’y a aucune honte là-dedans. Je recherche les défis que les autres auraient peur de prendre pour ne pas risquer de perdre."
En quête d’un deuxième titre chez les mi-lourds, après la version WBO remportée contre un vieillissant Sergey Kovalev fin 2019, le champion unifié à quatre ceintures des super-moyens a cette fois buté sur une marche trop haute pour lui avec un Bivol invaincu et au sommet de son art. Ce qui n’enlève rien aux accomplissements du Mexicain, sacré dans quatre catégories, et à la grandeur de celui qui a affronté quatre champions du monde invaincus depuis décembre 2020 quand il part en quête d’un tel objectif historique (un seul ancien champion chez les super-welters avait gagné deux fois un titre chez les mi-lourds, le célèbre Tommy Hearns, plus grand, plus long et plus puissant que lui).
On ne célébrera pas autant les juges de Las Vegas, qui comme plusieurs fois dans le passé ont avantagé Canelo plus que sa performance ne le méritait avec trois cartes à 115-113 – il y aurait donc eu match nul si Bivol n’avait pas remporté le dernier round – alors qu’il a été archi dominé et ne mérite sans doute pas plus que trois reprises en sa faveur. Les trois juges avaient même le Mexicain à 4-0 après quatre rounds, une hérésie absolue et tout sauf une aide pour un Canelo dans le viseur de nombreux amoureux du noble art pour cette raison.
Et la suite après tout ça? Le Mexicain, qui va perdre sa place de numéro un pound-for-pound (toutes catégories confondues) pour de nombreux observateurs après cette défaite alors qu’on pourrait argumenter pour l’inverse vu le challenge qui était devant lui, aurait dû retrouver son vieux rival Gennady Golovkin pour une trilogie – il y avait eu un nul en 2017 et une victoire de Canelo aux points en 2018, deux résultats controversés – en septembre prochain en cas de victoire sur Bivol. "J’ai gâché tes plans Eddie", en souriait le Russe en interpellant Eddie Hearn, patron de Matchroom Boxing et maître d'œuvre de ce deal à deux combats avec la superstar mexicaine.
Canelo a tout de suite prévenu qu’il comptait activer sa clause de revanche contre le deuxième homme à l’avoir battu: "On ne s’arrête pas là. Je suis très compétitif, j’ai plein d’années devant moi et je vais revenir plus fort. On veut la revanche et on fera mieux dans cette revanche." On peut compter sur lui et son coach Eddy Reynoso pour cela. Sans doute pas assez concentré sur sa tâche, à l’image de ces déclarations dans la semaine où il évoquait son envie d’aller défier… Oleksandr Usyk chez les lourds (le combat de samedi a dû le vacciner de cette idée folle), Canelo sera sans doute un adversaire plus coriace pour Bivol lors de leurs retrouvailles même si inverser le résultat sera tout sauf facile vu la démonstration de supériorié signée par le Russe ce samedi.
Mais avec cette défaite, le voir revenir chez les super-moyens, la catégorie où il se sent le mieux, donne également très envie: des combats pour ses quatre ceintures contre Golovkin – ce qui était prévu – ou David Benavidez, voire un Jermall Charlo qui monterait depuis les moyens, paraissent désormais bien plus intrigants. Bivol, lui, ne dit pas non à la revanche contre Canelo: "Il m'a donné une opportunité, je dois lui rendre s'il la veut". Mais celui qui a su ne pas laisser la pression de l’événement le rattraper souhaite à raison être "mieux traité" (il est entré sur le ring en premier contrairement à la tradition, n’a pas été mis en avant pour la promotion alors qu’il était le champion et n’a pas vraiment pu négocier sa bourse).
Il propose même de descendre chez les super-moyens pour défier le Mexicain pour ses quatre ceintures de la catégorie, l’équivalent d’un cambrioleur venu chez vous à qui vous mettez une raclée avant de partir le voler chez lui. Avec son sens de l’humour efficace et une popularité qui a explosé en une soirée (il a triplé ses abonnés Instagram), Bivol aurait bien raison de surfer sur la vague pour reprendre un Canelo qu’il sait pouvoir battre et contre lequel il peut toucher un très gros chèque pour une revanche.
>> Retrouvez le podcast RMC Fighter Club pour tout savoir sur la victoire de Bivol face à Canelo (et sur la suite pour les deux)
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Mais il y a un autre combat pour lui qui donne envie à tout le milieu et que l'intéressé évoque comme "(s)on but": un choc fascinant contre son compatriote Artur Beterbiev, champion WBC-IBF favori pour ajouter la ceinture WBO à sa collection lors de son combat Joe Smith Jr le 18 juin à New York, pour unifier les quatre titres de la catégorie. Bivol saurait-il éviter la puissance de Beterbiev pendant douze rounds? On espère vite avoir la réponse pour désigner le meilleur mi-lourd de la planète. Seule certitude depuis samedi: il ne s’appelle pas Canelo Alvarez.
https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport